A l'heure du thé
Aux premiers rayons obliques que rien n'indique
Garçonnière
Langoureuse, détachée, un bas à mi-mollet,
Une poupée à ses pieds, elle bouge ses deux longs cils,
Qui semblent se déplacer par d'invisibles fils,
Ses blonds cheveux ondulent comme, dans l'été, les blés
Jaunis se laissent aller au rythme des vents variés.
Indolente, elle a gémi à peine et sourit
De la lente cadence qu'en amour elle apprécie,
Les fleurs déjà fanées n'embaument plus la chambrée :
Son parfum vanille-caramel l'a emporté
Avec, précieuse relique, son amant s'en est allé.
Des yeux lapis-lazuli
Son esprit de taille et d'estoc tranche comme l'épée,
Dans la tiédeur moite des béni-oui-oui, jamais
Elle ne séjourne, armée d'un caractère entier,
Cette femme guerroie ferme, sans lâcheté ni pitié.
Vous la verrez parfois reposée, le glaive baissé,
S'amuser des mots pour leur futile beauté
Comme une parure au langage qu'elle porte
Avec héroïque hauteur dans la cohorte.
C'est ainsi qu'elle alterne d'albâtre et d'ébène
Le chaud et le froid des termes qu'elle vous assène.
Ses propos, hier cinglants, aujourd'hui riants,
Ne présagent pas le lendemain du temps changeant.
Condamnés à son joug par émerveillement,
Spectateurs de son hypnotique envoûtement,
Vous la verrez sûrement, entre nuit et jour,
Troquer son armure contre escarpins de velours.
Elle extrude, de la gemme de calcaire noir et blanc,
Découvrant un bleu d'outremer venu d'Orient
Ou d'un lac Baïkal aux transparents abysses,
Ses yeux pris dans un aphrodisiaque lapis.